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Omar Victor Diop, photographe sénégalais : le choix d’Afrique in Visu

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[box]Cet article fait partie du dossier de la semaine du 21.10.13 : Nouveaux regards sur l’Afrique[/box]

Dans le cadre de notre semaine « Nouveaux regards sur l’Afrique », Our Age Is Thirteen a proposé une carte blanche à des acteurs culturels spécialisés sur le continent africain. Aujourd’hui, nous vous présentons le choix d’Afrique in Visu : Omar Victor Diop.



Omar Victor Diop

Photographe sénégalais, Omar Victor Diop découvre sa passion pour l’image il y a seulement 3 ans. Repéré sur Internet, il expose aux Rencontres de Bamako ses clichés de mannequins habillés de déchets. Loin des images documentaires, il utilise la couleur, le studio et la mise en scène pour parler de sujets environnementaux et sociétaux. Ça ressemble à de la photographie de mode mais ça n’en est pas ! Comment Omar Victor Diop est-il devenu photographe ? Comment évolue-t-il dans le milieu photo africain ? Quel regard porte-t-il sur ce milieu et comment s’y place-t-il ? Entretien.

OAI13 : Comment es-tu devenu photographe ?
Omar Victor Diop : J’ai presque envie de dire que je suis devenu photographe « par la force des choses ». En 2010, alors que j’étais encore employé dans une multinationale qui m’avait affecté au Kenya, puis au Nigeria, j’ai acheté un appareil photo semi-professionel, plus par envie de meubler mes weekends avec des randonnées photo que par désir de devenir un photographe accompli. J’ai commencé par photographier des paysages urbains africains et grâce aux réseaux sociaux, mes photos ont très vite attiré l’attention de « profanes » puis de professionnels qui m’ont encouragé à développer mon propre regard et à m’exprimer par la photo.



Omar Victor Diop

À mon retour au Sénégal, j’ai décidé de réfléchir sur mon premier projet conceptuel. Il s’agissait d’une fiction qui imaginait les pages d’un magazine de mode du XXIIe siècle, et qui partait de l’hypothèse suivante : « Nous sommes en 2112, le neuf est dorénavant de très mauvais goût et le recyclé, c’est chic. » Les photos sont composées à la manière d’un lookbook, sauf que, les modèles sont vêtues de tenues que j’ai créées à partir de mes propres déchets de consommation : bouteilles usagées, vieilles serpillères, papier journal, brosses à récurer, etc.

Ce projet a été retenu pour la Biennale de Bamako, qui sont les rencontres de la photo les plus courues du continent, et elles ont en quelque sorte « lancé » ma carrière.



Omar Victor Diop

OAI13 : Comment as-tu mis en place ton travail personnel ?
OVD : Mon portfolio est le résultat d’une suite d’expérimentations. En terme de photo ou d’expression artistique, je suis autodidacte et chaque projet que j’ai réalisé représente pour moi un cycle d’apprentissage nouveau, un nouveau chapitre dans mon évolution en tant qu’artiste utilisant la photo pour s’exprimer.



Omar Victor Diop

OAI13 : Que veux-tu défendre à travers la photographie ?
OVD : Je ne suis pas sûr de vouloir utiliser le terme « défendre » parce qu’il induit une dimension militante que je n’ai pas toujours. Je dirais plutôt qu’à travers mes images, je souhaite contribuer à l’écriture d’un nouveau chapitre dans l’histoire de la création photographique sur le continent africain, principalement l’Afrique subsaharienne. Je pense que nous sommes plusieurs artistes africains qui essayons de sortir des sentiers battus et qui produisent des œuvres inattendues, tant par leur fond que par leur forme, et c’est ce que je trouve excitant.

OAI13 : Pourquoi utiliser une esthétique de photographie de mode ?
OVD : Je crois que bien plus qu’utiliser une esthétique de photographie de mode, je cherche à démontrer que l’esthétique est permise en terme d’expression visuelle et ce, quelle que soit la thématique. En particulier lorsqu’il s’agit de sujets portant sur l’Afrique, on a souvent tendance à valoriser la photographie dite « sérieuse » et morose, parce qu’on refuse de se laisser interpeller par les choses ayant une dimension esthétique. Mon défi, c’est d’utiliser d’autres codes visuels pour parler de choses tout aussi profondes. Ce n’est pas parce que c’est beau ou drôle que ce n’est pas sérieux ou pertinent.

OAI13 : Comment ton travail s’est-il diffusé ?
OVD : Je dois beaucoup aux réseaux sociaux, car au-delà du fait qu’ils m’ont offert un public, ils m’ont aussi donné une certaine confiance en mes projets. Nous vivons une ère à la fois fantastique et effrayante, en ce sens que les succès se démultiplient à une vitesse « virale », mais il est aussi très facile de se ridiculiser à l’échelle de la planète. Par exemple, une de mes photos du dernier projet que j’ai réalisé avec le photographe Antoine Tempé a été postée sur une page dédiée à Frida Kahlo sur Facebook, il y a quelques jours. J’étais très étonné de voir le lendemain qu’elle avait été « likée » plus de 30 000 fois et partagée par plus de 4 000 personnes… C’est énorme!

OAI13 : Comment évolues-tu dans le milieu photo africain ?
OVD : J’ai mon « réseau » de collègues photographes que j’ai rencontré lors d’évènements auxquels j’ai participé, et nous avons de bons rapports entre nous. Je regarde avec beaucoup d’intérêt ce qui se crée, et je trouve que c’est stimulant de faire partie de cette génération d’artistes, pas seulement africains d’ailleurs. J’aime beaucoup, par exemple, le travail d’une Zanele Muholi (Afrique du Sud), d’une Ayana V. Jackson (USA) ou d’un François-Xavier Gbré (Côte d’Ivoire).

OAI13 : Comment se développe la photographie en Afrique selon toi ?
OVD : Je pense que la photographie produite sur le continent est dans une phase de libération, de destruction des barrières que, parfois, nous nous sommes nous-mêmes posé. Je vois de plus en plus de projets utilisant un langage décomplexé et portant sur des sujets moins traditionnels que ce que l’on a pu voir dans le passé. Je pense que le challenge de notre époque, ce n’est pas tant le développement de la photo que la libération de l’expression photographique. Ce n’est pas parce qu’on est « photographe africain » qu’on doit se faire un spécialiste de thèmes attendus.



Omar Victor Diop

OAI13 : Comment vois tu-l’avenir photographique sur ce continent ?
OVD : Je crois que l’avenir artistique d’une manière général s’annonce radieux. Je pense qu’il y a un intérêt pour la création artistique africaine qui dépasse l’envie d’exotisme. On cherche à redécouvrir le continent dans son urbanité, sa dimension contemporaine et moderniste. Ce n’est pas un effet de mode, je crois que c’est une tendance lourde, et c’est très bien ainsi.



Omar Victor Diop


Omar Victor Diop


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Qu’est-ce qu’Afrique in Visu ?

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    • L’association Afrique in Visu est la première plateforme participative d’échanges autour du métier de photographes en Afrique.
    • Initiée en octobre 2006 au Mali par Jeanne Mercier et Baptiste de Ville d’Avray.
    • Afrique in Visu collabore quotidiennement avec une centaine de contributeurs réguliers ( journalistes, photographes, historiens…).
    • Site internet : www.afriqueinvisu.org

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Omar Victor Diop


Crédit photo : Omar Victor Diop
Site internet : www.omarviktor.com
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